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Scénario définitif


Scénario de l'exposition. « Sur les traces du serpent »


Cette exposition sera conçue et réalisée par les élèves d'une « master class » de l'Ecole normale supérieure - lettres et sciences humaines de Lyon, et  de l'Ecole du Louvre, sous la direction de Marie Gautheron et Claire Merleau-Ponty. Elle sera présentée au musée des Confluences dans la rotonde l'ancien musée Guimet. Les objets exposés proviendront des collections du musée des Confluences (collection naturalistes et ethnographiques) et du musée du quai Branly.


Le choix du scénario

Présent dans presque tous les écosystèmes et la plupart des cultures du monde, le serpent suscite partout fantasmes et constructions symboliques. A la fois bénéfique et maléfique, terrestre, arboricole, ou aquatique, il adopte toutes les formes et se prête à de nombreuses transformations, il fournit un corps ou un support à toutes les chimères. Capable d'accomplir bien des actions humaines, il est souvent présent sur la scène de la création du monde.
Le scénario adopté pour l'exposition tente de rendre compte de cette universalité, de la complexité et de la diversité des imaginaires du serpent. C'est pourquoi il ne privilégie aucune culture, et joue la confrontation entre toutes les cultures (y compris la culture occidentale).

Le scénario choisit de tirer parti de la bipolarité des collections, qui permet de confronter aux artefacts (serpents réalistes, plus ou moins symboliques, simples signes ou représentations complexes), des serpents biologiques (naturalisés, conservés dans de l'alcool). Il confronte aussi à la formidable diversité biologique des serpents (formes, couleurs, motifs, mais aussi comportements), la diversité des représentations, des récits et des mythes que ces particularités ont suscités.

Il rend compte de la richesse du monde ophidien, au sein du monde polymorphe des reptiles - complexité qu'enrichit la perspective phylogénétique. Il s'agissait dès lors de faire le portrait du serpent à travers des « personnalités » singulières. Les moeurs, les systèmes de défense et de prédation, l'aspect si différent du cobra et de l'anaconda, du python, de l'aspic ou de la couleuvre donnant lieu à des récits très  différents.

Certains des caractères distinctifs du serpent (écailles, sang froid, modes de croissance et de reproduction) le rattachent à sa famille reptilienne, aux lézards ou aux crocodiles. Il s'agissait donc aussi de suggérer ces parentés, éminemment stimulantes pour la pensée symbolique.

« Sur les traces du serpent » : le thème de l'exposition avait l'ambition de placer le public dans une posture dynamique. Déplacements, prédations, ou transformations du serpent : le rythme biologique de l'animal entraîne le visiteur dans une chaîne ou un réseau de mouvements. Le scénario propose un va et vient entre des propriétés observables et les propriétés imaginées d'un animal dans  son environnement d'herbes ou de forêt, de sable, de failles rocheuses ou de trous d'eau.

L'épaisseur symbolique du serpent rendait vaine la tentative de restitution systématique « des » mythologies du serpent, et arbitraire, le choix de l'une d'elles. Nous pensons que c'est la mise en résonance de quelques-unes des mythographies, qui peut rendre perceptible la puissance de l'imaginaire du serpent.

Il était donc nécessaire de partir de l'animal et de ses formes sensibles, et d'associer à ses caractères biologiques objectifs, des représentations générées par leur observation.

Le scénario s'intéresse au serpent tel que l'être humain le perçoit : il veut ainsi restituer la part de mystère d'un être qui se dérobe le plus souvent à la vue, et qui par ses pouvoirs multiples (discrétion, pénétration, strangulation, venin, régénérescence) constitue le danger par excellence - c'est à dire aussi l'allié, l'assesseur, la puissance à se concilier. D'où la structure souvent bipolaire de chacune des séquences, qui témoigne de la réversibilité des potentialités du serpent, dès lors que l'homme est parvenu à se les approprier (par ex : empoisonner - guérir, tuer - ressusciter).

Associés à ses aspects sensibles (visuels, tactiles, sonores), les comportements ou « façons d'être » spécifiques du serpent ont nourri la pensée symbolique ; ils sont déclinés en signes ou figures dans les artefacts ou les pratiques qui leur sont associées (ex : les danses du serpent, dans de nombreuses cultures).

Les différentes séquences du scénario

Il a été décidé d'organiser le scénario autour des « actions » du serpent après nous s'être assuré que les collections de sciences naturelles fourniraient au moins un objet par séquence du scénario (une vidéo ou une photographie viendra suppléer l'absence d'objet naturel dans la dernière séquence).

Nous avons donc entrepris de dissocier la dimension anthropomorphique de nos perceptions (le serpent qui « danse », « protège »...) pour nous attacher rigoureusement aux « actions » du serpent - qui seules, nous permettaient d'établir, dans toute la mesure du possible, des liens visuellement indiscutables entre l'animal et l'artefact s'y référant.

Toutefois, la vie du serpent est en grande partie secrète. Le scénario progresse donc de la plus grande visibilité - qui permet de relier aux artefacts, des formes (serpentine, rectiligne, circulaire) et des mouvements observables (s'enrouler, se dresser/gonfler, avaler/piquer/mordre/digérer) à des traces (muer) - pour arriver à l'opération la plus secrète de toutes : la reproduction, la génération.

Nous avons ainsi distingué 7 + 1 opérateurs ou « actions » :

Introduction

De façon très synthétique, elle présente :
- Le serpent dans la famille des reptiles
- Les principales espèces avec leurs caractéristiques (localisation, niche écologique, prédateurs et aliments, taille, aspect etc.)
- La variété et la beauté de la peau (motifs, couleurs, textures) des serpents, qui seront   particulièrement valorisées
- Les rapports de l'Homme et du serpent selon une vision aussi synthétique et universelle que possible.


Ramper (zigzaguer, onduler, avancer en ligne droite, grimper)

Objets naturels : serpents naturalisés (rectilignes) + squelettes + serpents dans de l'alcool (serpent ondulant)

Cette séquence est consacrée à la reptation. Des squelettes de serpents permettront d'expliquer la perte originelle des pattes, évolution biologique qui a conduit l'animal à ramper.

La reptation correspondant au caractère plastique et particulièrement graphique du serpent, cette séquence accueille des objets intéressants par leur ligne (bâtons de commandements, bronzes africains) ou leur décor linéaire stylisé (poteries décorées, motifs textiles)

Dans la plupart des populations du monde, le choix de la représentation graphique de l'animal est celui de la forme ondulante, immédiatement comprise comme désignant un serpent. Différents textiles et poteries dotés de motifs géométriques entrent dans cette catégorie.

L'action de ramper sera ici reliée à l'aspect chthonien du serpent, ce gardien des mondes souterrains.

Le motif de la ligne ondulante permettant d'introduire celui du « serpent qui danse » (Baudelaire). On présentera la ligne serpentine matérialisée non dans l'aspect des objets rituels eux-mêmes, mais dans la « danse ondulante du serpent » qui les anime (marionnettes Kuyu, poupées Katsina + photographies ou vidéos) ;


S'enrouler (enlacer, étreindre, étouffer, se lover)

Objets naturels : serpents naturalisés (enroulés autour d'une branche, lové sur lui-même) + alcools (serpent en spirale)

Cette séquence est consacrée à la faculté du serpent à s'enrouler autour de supports divers : branches d'arbres, animaux, êtres humains et à la déclinaison de cet enroulement sous forme de bijoux, de parures ou de représentations figuratives.
La notion d'enroulement peut-être vue sous son aspect symbolique, tantôt bénéfique, tantôt maléfique. Ce thème illustre l'ambivalence d'un animal qui est à la fois celui qui enlace (le serpent enlaçant le cou de la prêtresse-serpent au Bénin) ou dont l'enroulement protège (le serpent Naga Mucilinda, qui s'enroule sous Buddha afin d'éviter que la montée des eaux ne vienne troubler se méditation), mais aussi un prédateur qui peut, dans une étreinte mortelle,  emprisonner sa proie dans ses anneaux pour l'étouffer (Laocoon)


Se dresser (attaquer, protéger, fasciner)

Objets naturels : serpents naturalisés (cobra royal dressé +  python / mangouste) + alcools (serpent érigé)

Cette séquence introduit de nouveau l'ambivalence de l'animal, qui se dresse pour attaquer mais aussi pour protéger (le serpent Ananta protégeant le sommeil de Visnu entre deux cycles cosmiques ou le Naga protégeant de la pluie Bouddha en méditation). Le serpent dressé est aussi l'image du pouvoir et de la force, qu'illustreront des objets spectaculaires (masques Dogons, uraeus, serpent d'airain)

Dressés, la gorge gonflée, certains serpents tentent de fasciner leur victime : la séquence présente la fascination réciproque du serpent et de l'homme « charmeur de serpents » (des flûtes de charmeurs de serpents bien que les serpents soient sourds !)

Pour apporter une explication possible à la fascination que peut exercer le serpent, un intérêt particulier sera porté au regard du serpent (qui dort les yeux ouverts) et aux motifs de sa tête qui «redoublent » ce regard dans la nature et dans les artefacts s'en inspirant.


Avaler (chasser, digérer, s'avaler, être avalé)

Objets naturels : squelette avec gueule détaillée + vidéo

Cette séquence s'intéresse au régime alimentaire et digestif particulier du serpent : obligé d'avaler sa proie sans la mastiquer, sa mâchoire s'ouvre démesurément, son estomac a la capacité de digérer tout l'animal avalé, sa digestion peut être très longue. De nombreuses représentations réalistes mettent en scène le serpent à l'affût, ou dévorant sa proie, ou à contrario, dévoré par ses prédateurs (oiseau attaquant un serpent que l'on retrouve en Amérique, en Afrique ou en Océanie). De nombreux mythes s'inspirent de la forme « avalante » du serpent (sculpture cérémonielle de Nouvelle Irlande, Ouroboros)


Empoisonner (mordre,  cracher, piquer, tuer)

Objets naturels : serpents conservés dans des bocaux d'alcool) ; squelettes (crochets à venins)

Appuyée sur l'évocation de cette autre forme de prédation qu'est la morsure venimeuse, cette séquence met en scène la réversibilité des propriétés de nombreuses espèces de serpents qui sont capables d'immobiliser et de tuer leur ennemi en l'empoisonnant avec leur venin, soit en crachant soit en mordant avec leurs crochets. L'homme s'approprie le venin du serpent pour nuire (flèches empoisonnées), ou pour guérir (masques de guérisseur du Sri Lanka), le serpent devenant alors l'animal médecine par excellence (caducée).


Muer (perdre sa peau,  changer de peau, grandir, vieillir/rajeunir)

Objets naturels : mue de serpent.

La peau des reptiles ne se régénère pas continuellement comme celle des mammifères : le serpent mue plusieurs fois au cours de son existence,  pour restaurer sa peau et pour grandir. Sur le plan imaginaire, la mue symbolise sa faculté à renaître toujours de lui-même, sorte d'immortalité. La mue du serpent fait de lui un être de mutations et de métamorphoses.

Cette séquence présente des objets évoquant les pouvoirs de régénérescence, d'immortalité du serpent. En Asie le dragon au corps et aux écailles de serpent qui tient dans sa gueule la perle d'éternité, en Amérique du sud le serpent à plume Quetzacoatl, en Océanie, le serpent arc-en-ciel.


Féconder (copuler, donner naissance, pondre, se reproduire)

Objet naturel : vidéo (photographie) de copulation/naissance de serpents.

La fécondité du serpent, dans le parcours de l'exposition, est sa fonction naturelle la plus secrète et symboliquement, c'est la plus riche. Le serpent se signale par ses capacités à signifier les organes sexuels (masculins et féminins), et les fonctions sexuelles en général. Seront présentés dans cette séquence les objets qui associent le serpent à la procréation, à la fécondité, à la naissance.

Symboliquement, le serpent féconde les terres en faisant tomber la pluie et il est associé à la création du monde dans de nombreuses cosmogonies (le dragon faiseur de pluie, le barattage de la mer de lait en Asie, le « Temps du Rêve » en Australie...) : un objet de chaque continent viendra éclairer cette potentialité.

Séquence transversale

Glisseur, siffleur ou sonneur (crotales), le serpent est aussi un animal sonore, caractère porteur d'une importante dimension symbolique : un parcours sonore accompagnera l'exposition dans son ensemble.

Il permettra d'associer à des sons, des instruments de musique réalisés en peau ou en vertèbres de serpent, que l'utilisation du serpent dans ces artefacts soient, ou non, investis d'une dimension symbolique.


 

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Mise à jour le 23 novembre 2008
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