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Cimier Bansonyi

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Chez les Baga de Guinée, je suis le grand serpent python Bansonyi. Ce que vous voyez, vous profanes, c'est un masque aux yeux brillants de grande taille en forme de S comme le serpent. En réalité, je suis bien autre chose...
Je suis né de la déesse python Ninkinanka. En me donnant la vie, elle m'a transmis des pouvoirs magiques qui font de moi un être unique, aux yeux de mes adorateurs. Les hommes ont voulu me revêtir d'une enveloppe charnelle ; ils ont fait appel à un sculpteur du village qui m'a taillé avec talent dans un bois de fromager. Je vis dans la forêt sacrée, à l'abri des regards. Chaque année, un initié vient me nettoyer et redonner de la vivacité à mes couleurs ; comme si le temps avait pris sur moi !
Je suis le dieu de l'initiation Kä-Bërë-tshol. J'accompagne à travers leurs épreuves physiques les jeunes enfants baga dans leur seconde vie, celle des adultes. On m'a choisi pour ce rôle, car moi-même, serpent, je change souvent de peau. À la fin de leur initiation, je fais une sortie très remarquée : juché sur la tête d'un homme, j'atteins trois mètres de haut ! Sous les acclamations du village, je me bats contre mon double féminin ; je représente la moitié masculine du village, la plus ancienne et la plus forte. Naturellement, je remporte le combat à chaque fois.
Les sorties que je préfère sont celles qui ont lieu dans le secret de la nuit, quand je retrouve ma vraie nature. Mon porteur est possédé par ma présence et se met à mimer mes déplacements. Il ondule, je redeviens serpent... Mes initiés, au son des cloches, se mettent alors à danser pour m'honorer.
Quand je suis satisfait, je fais tomber la pluie sur les rizières pour remercier les hommes. Je peux aussi rendre leurs femmes fécondes, afin de perpétuer notre lignée. Ma grande taille fait aussi de moi la sentinelle du village ; je repère et punis les sorciers qui oseraient s'en approcher.
Aujourd'hui, mes compères bansonyi et moi sommes redevenus invisibles. Nos masques ont été confisqués ou détruits par des hommes qui voulaient éradiquer notre culte ; des hommes blancs en ont sauvé des centaines en les emportant dans leurs pays.
Mais nous avons survécu, nous demeurons au cœur des forêts sacrées où nos initiés savent toujours nous trouver. Notre existence reste gravée dans la mémoire baga ; même les plus jeunes qui ne nous ont jamais vus continuent de nous craindre.
Maintenant que vous savez qui je suis, ne vous arrêtez pas à mon apparence physique si bien mise en valeur dans vos musées : ce n'est qu'une part morte de moi-même. En réalité, je continue de veiller, de danser, de vivre là-bas, en pays baga...

Pauline Lamy

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Haut de masque serpent Bansonyi. Boké (Guinée), culture baga, xixe - début xxe siècle. Bois sculpté et peint, 240 x 25 x 40 cm. Paris, musée du quai Branly.
 
 
Mise à jour le 29 octobre 2008
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